Réquisitoire contre Robert Brasillac
Le journaliste et auteur très célèbre à l’époque, Robert
Brasillac a en particulier été condamné pour délation et « collaboration
intellectuelle» :
« Fondamentalement, conclut Reboul, Brasillach avait
l'âme d'un dénonciateur. Il avait dénoncé la Sorbonne parce qu'elle abritait des
enseignants engagés dans la Résistance, il avait dénoncé des étudiants du lycée
Lakanal qui avaient arraché un portrait de Pétain du mur de leur classe, il
avait dénoncé un jeune homme de l'Hérault qui avait ridiculisé Pétain
dans un discours du 14 Juillet.
Reboul fit un pas de plus : il souligna le fait que chez
Brasillach il ne s'agissait pas d'un cas ordinaire de dénonciation, et pour ce
faire il ne ménagea pas sa peine : « Sans
doute, vous n'êtes pas le dénonciateur qui va, en rasant les murs, toucher à la Gestapo le prix du sang, mais on peut aujourd'hui légitimement vous considérer comme un dénonciateur plus large, plus schématique, un dénonciateur d'une autre sorte, un dénonciateur presque officiel, car il suffit aujourd'hui à votre crime de ne pas pouvoir nous dire avec certitude si la Gestapo, après la lecture de vos articles — et elle les lisait — a négligé d'aller faire un tour en Sorbonne ou dans ce village de l'Hérault ou au lycée Lakanal. » Alice
Kaplan « le procès Brasillac »
« Reboul ne
cessa de revenir sur le désir de vengeance qui animait Brasillach, son
désir de faire souffrir ses ennemis : « On les
laissera crever sans sourciller, qu'on se rassure. Mais c'est urgent » ; « Qu'attend-on
pour fusiller les députés communistes ? » ; « C'est sans remords, mais au contraire plein d'une
immense espérance que nous vouons ces derniers au camp de
concentration, sinon au poteau ». Les hommes en question étaient ses concitoyens, des députés
de la Troisième République, des résistants, des gaullistes, des communistes; des
hommes dont la vie était menacée par les nazis, des hommes avec qui
les membres du jury pouvaient s'identifier entièrement. …Le lendemain
Brasillach écrivit à Maurice Bardèche : « Tout ce qu'il fait est de lire
certains de mes articles adroitement découpés » Quelle contrariété pour Brasillach, qui
avait bâti sa propre gloire de critique sur la manipulation malveillante de
citations bien placées ! Et là il se faisait des illusions,
car il savait bien que des citations plus longues n'auraient en rien arrangé sa
situation. » Alice Kaplan « le procès Brasillac »
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