La conception première des Grecs de la Liberté était, nous explique Jacqueline de Romilly, de ne pas être esclaves d’un autre peuple. Puis vient la conception de la Liberté grecque – athénienne – de vivre dans une cité régie par la Loi : la liberté par la Loi.
Liberté, Patrie, discrimination, domination
La conception première des Grecs de la Liberté était, nous explique Jacqueline de Romilly, de ne pas être esclaves d’un autre peuple. Puis vient la conception de la Liberté grecque – athénienne – de vivre dans une cité régie par la Loi : la liberté par la Loi.
Le droit des peuples à l’autodétermination est issu de cette conception primitive de la Liberté : ne pas être esclave d’un autre peuple. L’idée de Nation moderne est issue de la conception seconde de la liberté par la Loi votée par les citoyens. Les Républicains soulignent que la conception moderne de la Nation repose sur l’idée du vouloir vivre ensemble, selon une certaine loi.
Personne ne songe à critiquer l’idée de «droit des peuples à disposer d’eux-mêmes». Pourtant l’idée de non discrimination, de droits universels, qui est fondamentalement celle des droits européens et anglo-saxons, s’oppose au découpage de l’humanité en peuples.
Si : «"...Il n'y a plus ni Juif, ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme..." (St Paul),
si : «Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, ..., de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée .... » (Code pénal français art.225), alors comment parler de «peuple» sans tomber dans la discrimination, l’identitarisme, le racisme ?
A peine ose-t-on formuler que le rattachement des individus à ces «peuples» ou «communautés», en fonction de leur généalogie ou autre critère, peut porter atteinte à leur liberté d’autodétermination personnelle dont seul un statut indifférencié de «citoyen» permettrait l’exercice. L’idée de domination fait aujourd’hui oublier que l’idée de peuple ayant droit à l’autodétermination suppose celle d’«identité» de ce peuple. La compassion pour les peuples «dominés» se confond avec une image d’absolue innocence de ces «victimes»...
La vérité est que le nationalisme breton ou kanak tend ni plus ni moins au racisme que le nationalisme allemand ou français.
La notion d’«identité» est différente de celle de «contrat social» ou de «loi commune». Un peuple a une «identité», parce qu’il a une histoire, une géographie, quelque chose de «charnel», incarné dans une culture ou un «génie», qui peut le faire confondre avec une «race».Une nation qui se définirait uniquement par des principes «nationaux» abstraits, en fait si «universels» qu’ils peuvent et devraient, du moins on le souhaite, être adoptés par toutes les Nations de la terre, a-t-elle une «identité» ?
La condamnation de l’«identité» des vieilles nations «dominantes» est véhémente.
Pourtant, se préoccuper de la «culture» française, parler de «génie français» est-il plus raciste, ou plus ou moins proche du «Volkgeist» - qui nous a mené où l’on sait - que de se préoccuper de la conservation de l’«identité» aborigène ?
Pourtant, se préoccuper de savoir si la transmission de cette culture ne nécessite pas quelques générations avec des mariages «mixtes», cela serait-il une présomption irréfragable de «racisme» ? Voilà une condamnation bien lourde du «crime» de nostalgie, ou peut-être simplement du péché de culture et de bon goût.
En vérité, la préservation des «cultures», notion holiste, pose des questions complexes à ceux qui tiennent avant tout à la liberté des personnes humaines, individuelles. Elles ne seront pas résolues à coup d’accusations de racisme, elles ne seront d’ailleurs sans doute jamais résolues.
Mais il y a pire en vérité bonnes gens. En vérité, braves gens, si vous tenez à conserver vos précieuses libertés et «non-discriminations», il va vous falloir faire quelque distinction entre «vous» et les «peuples» ou «communautés» qui ne partagent pas votre attachement à la démocratie, la liberté et la non-discrimination.
Il faut que vous compreniez bien, braves gens, que si vous vous interdisez de dire ou de penser que vous êtes un «nous», si vous vous interdisez de songer à une stratégie de ce «nous», ce sont ceux qui visent à «vous» dominer, qui «vous» pensent comme un «eux» par rapport à leur «nous», et qui ont une stratégie pour parvenir à «vous» imposer «leur» ordre, leur régime politique, qui mèneront à bien leur projet. Et vous perdrez votre liberté, au moins.
Il vous faut donc faire un gros effort pour ouvrir les yeux (sur «leur» idéologie et «leur» stratégie) et penser (à comment vous en défendre). En commençant par distinguer entre les distinctions.
L’assimilation de «toute distinction» à une «discrimination» est une aberration. Tout notre droit repose par définition, qu’il s’agisse du droit romain et de ses syllogismes ou du droit anglo-saxon et de ses précédents, sur la distinction des diverses situations auxquelles correspondent les différents libertés, obligations et sanctions définies par la loi ou le juge.
Seules sont des discriminations, les distinctions appliquées sans rapport avec le droit considéré.
Par exemple, être «Noir» n’a aucun rapport avec la consommation d’alcool, être jeune oui, c’est pourquoi interdire des bars aux «Noirs» fut une discrimination, mais pas les interdire aux enfants.
La question n’est donc pas de savoir si nous devons penser à faire des distinctions entre les personnes qui ont un rapport avec des «puissances étrangères ennemies» ou des «communautés» ou des «religions» ou des «nations» qui visent à instaurer un ordre ou un régime contraire à nos principes de démocratie, d’égalité et de liberté.
D’une façon ou d’une autre, un jour ou l’autre, il faudra leur dire «Choisis ton camp Camarade !».
La question est : quelles distinctions devrons nous faire afin : de protéger nos libertés, notre démocratie pluraliste, et par là nos vies, sans nuire de façon disproportionnée ou injuste à ceux qui ne partagent pas notre idéal, mais qui cependant sont tout autant nos «frères et soeurs humain-e-s» et à qui, fondamentalement, au nom de nos principes, nous ne souhaitons que du bien et du bonheur.
Telle est la question politique cruciale pour toutes celles et ceux, juristes, politiques, citoyen-nes, travailleurs et dirigeant-e-s ... qui se préoccupent de l’avenir de nos enfants.
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