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Shmuel Trigano 2009 : toujours vrai

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Les deux fautes de la fondation de la mémoire de la Shoah
Shmuel Trigano 23 avril 2009
En lançant l’opération « Aladin » à l’UNESCO, en partenariat avec l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI), la Fondation de la Mémoire de la Shoah (FMS) a commis deux graves fautes, une faute politique et une faute morale. Ce n’est pas le projet de mettre le récit de l’histoire de la Shoah à la portée du monde musulman, et dans ses langues parlées, au moyen d’un site et sans doute à l’avenir de publications et d’événements, qui est en question. Ce sont les alliances problématiques qui le rendent possible et l’étrange troc politico-symbolique qui nourrit leur contenu. L’incompétence politique le dispute à l’indignité.
LA FAUTE POLITIQUE
Connaissez-vous l’Organisation de la Conférence Islamique ?
Son président était présent à l’UNESCO. C’est une Organisation internationale qui milite pour « défendre les intérêts et assurer le progrès et le bien être ... de tous les musulmans à travers le monde ». Fondée en 1969 à Rabat, après la tentative d’attentat contre la Mosquée El Aksa à Jérusalem par un fondamentaliste australien, son siège provisoire est à Djeddah, en Arabie Saoudite, dans l’attente de « la libération de Jérusalem ».
Sa charte (1972) lui assigne comme objectif « la défense des lieux saints de l’islam et la libération de la Palestine ». Sa création est une des conséquences de la conférence de Khartoum de septembre 1967 connue par sa devise des « trois non» : pas de paix avec Israël, pas de reconnaissance d’Israël, pas de négociations avec Israël...
C’est cette conférence qui décida de l’utilisation de l’arme du pétrole, prépara la guerre du Kippour (1973) et fit de la défense des droits du « peuple palestinien » (une des premières occurrences de ce terme) le but de sa politique. En mars 1989, l’OCI fut à la tête de la croisade contre le livre de Rushdie Les versets sataniques, et c’est elle qui agite « la rue arabe » chaque fois que l’Occident commet une « faute » envers l’islam.
En 1990, l’OCI adopte la « Déclaration des droits de l’homme en Islam » qui fait dépendre les droits de l’homme de leur conformité avec les principes de la Charia, une loi qui ne reconnaît pas l’égalité des non-musulmans et des femmes.
Connaissez-vous l’Alliance des Civilisations ?
Cette Organisation, qui dispose de budgets considérables venant des monarchies pétrolières du Golfe, est la poutre maîtresse d’un projet politique d’envergure mondiale : l’Alliance des civilisations (1) Née d’un projet du président iranien Mohamed Khatami (le Dialogue des Civilisations) pour s’opposer à ce qu’il croit être le projet de l’Occident, le « clash des civilisations », la création de l’Alliance fut théorisée en septembre 1998 à Durban lors de la conférence du mouvement des non alignés. Cette même conférence lançant le projet de faire de 2001, l'année du dialogue des civilisations, ce qui fut entériné par une résolution de l'AG en novembre 1998. Elle s’institua par la suite à l’ONU sous la forme d’une instance à part entière.
Dirigée par un Haut représentant, Jorge Sampaio, ancien président portugais, elle est soutenue par la Turquie, le Maroc et l’Espagne, convertie à ce projet au lendemain des attentats d’Al Qaida à Madrid.
De nombreuses fondations, notamment européennes, des multinationales et la Commission Européenne en premier, le projet euro-méditerranéen, apportent leur soutien et leurs fonds à une entreprise qui ambitionne de développer le dialogue entre les civilisations mais dont les retombées (et les objectifs inavoués) visent surtout à briser le cadreuniversel des relations internationales qui se fondent sur le primat des droits des individus et des règles universelles pour les refonder sur des rapports de « bloc », de « civilisations » - de religions, en fait - qui préserveraient ainsi leurs normes spécifiques contre des normes universelles. C’est exactement ce qui motive une déclaration islamiquedes droits de l’homme... Il est clair que l’un des buts politiques les plus importants de l’Alliance est de sanctuariser l’islam dans le monde entier, d’interdire toute critique à son égard et de l’installer sur toutes les scènes de la culture occidentale comme une donnée centrale. Lors du récent Durban II, à Genève, l’OCI s’est faite l’avocate de l’interdiction mondiale du blasphème et elle l’a obtenu sous la catégorie de « haine religieuse », ce qui est pire.
Dans ce projet, les partenaires concernés sont embrigadés sous le jour lénifiant du « dialogue ». Les Juifs sont particulièrement sollicités tout en étant réduits au rôle de figurants. Il faut, en effet, impérativement donner le spectacle de l’entente et s’assurer de leur participation pour accréditer cette entreprise qui se met sous l’égide du mythe de l’« Age d’or andalou » (2). Comment croire à la pureté de ces intentions alors que tous les pays islamiques sont actuellement soulevés par une vague d’antisémitisme virulent dont l’OCI est l’un des plus importants facteurs? Nous sommes entrés dans une ère où la culture et la religion sont instrumentalisées à des fins exclusivement politiques : prestige, puissance, gloire. La diplomatie des « civilisations », qui n’est plus celle des États, annonce une ère de guerres identitaires et culturelles.
Elle met, dans son fondement même, l’Occident au banc des accusés en le contrastant avec l’islam, « religion de paix ». C’est ce qu’on lit dans « L’Appel à la conscience » signée à l’occasion de l’inauguration :
« L’Islam reconnaît le judaïsme et le christianisme comme des religions révélées. Les Musulmans considèrent les Juifs et les Chrétiens comme des frères appartenant au «Peuple du Livre» qui partagent tous le monothéisme d'Abraham ... Juifs et Musulmans, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, ont vécu ensemble pendant des siècles et, s'il est vrai que les Juifs furent souvent victimes de discriminations dans le monde musulman, ils furent rarement persécutés. A la différence de leur sort en terre chrétienne, les Juifs n'ont pas été contraints d'abjurer leur foi. Les premiers stéréotypes antijuifs sont apparus, dans le monde musulman, au XIXe siècle, lors de la conquête (sic) du monde musulman par les puissances coloniales européennes. Il importe de le rappeler. »

La déroute de la FMS

En s’inscrivant dans cette mouvance, la FMS, est tombée dans un piège majeur dans l’arène des symboles et de l’idéologie. Elle n’a pas hésité à mettre de côté le contentieux entre le monde arabo-musulman et le monde juif pour assurer l’image de la Shoa dans l’opinion arabo-musulmane, alors que le négationnisme qui s’y développe a pour finalité unique de délégitimer l’État d’Israël. La FMS a fait en somme de cette mémoire une « transcendance » complètement séparée du destin des Juifs.
C’est bien ce qu’on lit aussi dans « L’Appel à la conscience »:
« La compréhension par les Musulmans de l'Histoire des Juifs, comme la compréhension de l'histoire des Musulmans par les Juifs (remarquons le balancement qui partage les responsabilités) est pervertie par des mythes et de la malveillance, qui les rend insensibles à la souffrance de l'autre, passée et présente. Mais, parmi les nombreux sujets qui nous divisent, il y en a un qui doit être exclu du champ politique, idéologique et religieux. Il s'agit de la Shoah, le génocide nazi au cours duquel six millions de Juifs d'Europe ont été massacrés.»

On ne peut mieux entériner la « religion de la Shoah », vivante dénégation du statut historico-politique des Juifs qui fonde leur existence comme État ou communautés diasporiques, ce qui est aujourd’hui au cœur du nouvel antisémitisme et de la survie de l’État d’Israël. On ne peut mieux saper à la base l’identification et la compréhension du nouvel antisémitisme contre lequel la FMS est censée lutter, parmi ses attributions...
Le discours de Jacques Chirac lors de l’inauguration était très significatif de cette déroute. L’ancien président, comme d’ailleurs d’autres orateurs qui lui ont succédé, ont inscrit le conflit proche-oriental et leur soutien à la Palestine, dans leur adhésion : « J’ai dit aux Israéliens que la colonisation était une faute. On ne construit pas la paix avec son voisin en expropriant ses terres, en arrachant ses arbres, en bouclant ses routes… ». L’ancien président a également reproché à certains de « vouloir faire porter aux pays musulmans une culpabilité qui n’est en aucun cas la leur ».
L’histoire retiendra qu’il a mis en branle il y a quelques années la machine inquiétante du « devoir de mémoire » que j’ai eu l’occasion d’analyser dans mon livre Les frontières d’Auschwitz, les ravages du devoir de mémoire (3), et qui consiste à dissocier dans la Shoah le martyrologe des Juifs du peuple juif. Le premier est dûment célébré comme « universel », « humain », quasi spirituel (exactement ce que pensait l’écrivain François Mauriac) mais il est compris comme l’envers de la condition historico-politique de l’existence des juifs comme peuple vivant, sauf si les Juifs consentent à devenir les grands prêtres de cette mémoire : une belle façon de contourner et de sublimer la culpabilité de l’Europe. Dans cette mémoire étatisée à travers des Mémoriaux, des Fondations, des Chaires académiques, l’existence du peuple juif avec ses dimensions communautaires et politiques fait problème. Elle dérange le côté lisse de l’objet vénéré. Ce qu’a bien illustré le même Jacques Chirac, auteur de la « repentance », dans sa politique envers Israël. La révérence faite à la « mémoire » victimaire a couramment autorisé moralement et fondé politiquement l’accablement d’Israël, accusé de la trahir si bien que les bénéficiaires (moraux et... financiers) planétaires de cette mémoire sont les Palestiniens. Nous touchons ici à l’idéologie institutionnelle de la Fondation de la mémoire. La FMS, qui, à n’en pas douter s’est lancée dans le processus « Aladin » en s’inscrivant dans la mouvance chiraquienne, vient d’apporter une nouvelle confirmation officielle à ce système idéologique, qui éclaire sa vocation idéologique implicite dans le paysage européen et mondial.
Que recherche la FMS avec « Aladin »?
C’est une question que l’on peut se poser. Il y a une naïveté sociologique à croire que le négationnisme arabo-musulman procède de l’ignorance des faits historiques. Il est au contraire de l’ordre de la croyance et de l’idéologie. Ce qui s’y trame, c’est moins l’histoire de la Shoah que le déni de l’existence d’un peuple juif qui aurait légitimité à la souveraineté. Si la Shoah en est devenu le vecteur, c’est parce que le peuple dans les Juifs en fut la cible, détruits en masse, toutes nationalités confondues. La Shoah pose la question du destin collectif des Juifs dans la politique moderne. C’est bien ce qui est en question avec l’État d’Israël. Dans le débat idéologique contemporain, y compris en Occident (4), la Shoah joue ainsi le rôle d’un substitut symbolique de la notion de peuple juif. Toutes les accusations d’excès de mémoire, de lobby juif, d’exploitation de la mémoire par l’État d’Israël ou les communautés juives, découlent de cette substitution symbolique. Tout lien de la Shoah au peuple juif est ainsi portraituré comme un dévoiement de la « Mémoire ». C’est une façon de dénier le droit d’exister au peuple juif au nom de la Shoah. C’est ce sanctuaire de la Shoah que la FMS veut défendre : aux dépens des intérêts et des valeurs des Juifs vivants.

En monde musulman, c’est pour mieux dénier le peuple juif que la Shoah est niée sous la forme du syllogisme suivant:
1) Le peuple juif n’existe pas
2) S’il existe (l’État d’Israël), c’est un mensonge (la Shoah)
3) L’État d’Israël ne peut exister que sur la base de ce mensonge et de la culpabilité de l’Occident qui a cédé à ce chantage.

Obtenir d’une institution juive qu’elle accepte la dissociation de la Shoah de la question cruciale pour la survie des Juifs que constitue aujourd’hui l’existence de l’État d’Israël est un atout considérable dans la lutte contre Israël. Elle rejoint toutes les déclarations arabes sur l’inexistence d’un peuple juif (5). Elle les absout des menaces proférées sur l’existence d’Israël. A ce compte, l’O.C.I. peut bien « reconnaître » la « mémoire de la Shoah »... Le bénéfice politico-symbolique est immense dans l’optique de ses objectifs. D’autant plus qu’elle entraîne un bénéfice secondaire : la condamnation de l’Europe (« colonialiste ») coupable, ce qui ne fait que rehausser l’excellence du monde islamique. Les stigmatisations de l’Europe coupable d’antisémitisme abondent de fait sur le site d’Aladin (cf. infra :l’étude de textes)
Quelle reconnaissance recherche la FMS ?
Quel type de reconnaissance de la Shoah, la FMS espère-t-elle ? En s’alliant à l’OCI et en plaçant donc son entreprise sous l’égide de « l’Alliance des civilisations », elle a choisi de ranger implicitement la Shoah dans le cadre du « patrimoine immatériel » de l’humanité où l’OCI a déjà placé la religion musulmane (« Convention pour la sauvegarde du patrimoine immatériel » adoptée par l’UNESCO en 2003 dans la lignée des Déclarations et Conventions sur la diversité culturelle (6). On retrouve toujours à ce propos la marque de Jacques Chirac qui a prétendu faire passer cette convention au nom de la défense de la francophonie contre la culture américaine mais qui n’a été adoptée que grâce au soutien des membres de l'OCI. La Shoah devient ainsi un élément de la Convention sur la diversité culturelle, ce qui revient à dire que la FMS a enfermé l’identité et toute la culture juives dans la mémoire de la Shoa, ce qui a de graves conséquences sur le plan de la compréhension de l’identité juive. En somme, la FMS a échangé la sacralisation de la Shoah contre la sanctuarisation de l’islam.
Il faut faire un peu d’histoire pour replacer cette démarche dans le paysage global et mieux comprendre ses tenants et aboutissants. La meilleure spécialiste en la matière, Malka Marcovich, nous renseigne à ce propos (7). « Lors de Durban I, l’inclusion de la mémoire de l’Holocauste a fait l’objet d’un troc entre l’Union Européenne et l’OCI, soit la mention de l’Holocauste en échange de la désignation particulière des Palestiniens comme victimes du racisme israélien... » « La mémoire de l’holocauste » (8) fut aussi reconnue pour mieux mettre en avant le caractère occidental d’un crime perpétré contre les Juifs. C’est ce que confirment alors « les déclarations finales (où sont émises des réserves au moment de l’adoption du texte), il apparait que l’inclusion de l’Holocauste sert à la condamnation des Européens plus qu’à la « reconnaissance » des Juifs. « La République islamique d’Iran a souligné que la mémoire de l’« holocauste » visait ici « l’holocauste des juifs » par les « Européens ». La Syrie est allée dans le même sens et a déclaré que c’était une « erreur » de la part « des Européens de vouloir faire partager leur culpabilité au monde » en donnant à l’Holocauste un caractère général. Le Qatar au nom de l’OCI a également souligné que les « pays extérieurs à l’Europe » ne pouvaient être « tenus responsables ». De même, les Émirats arabes unis (au nom également de l’Arabie saoudite, de Bahreïn, du Koweït, d’Oman et du Qatar) ont souligné le caractère européen de cette mémoire, et ont tenu à indiquer que « ce concept ne s’applique pas exclusivement à un peuple ou à un groupe particulier, comme l’illustrent clairement les pratiques racistes observées quotidiennement dans les territoires arabes occupés. »
L’inclusion de l’antisémitisme à Durban I soulevait le même type de problèmes. Il fut lié dans le même paragraphe à « l’islamophobie », réduisant la définition des attaques à l’encontre des Juifs, comme relevant uniquement de comportements contre la religion juive (puisque dans l’islamophobie il est question d’islam, de religion). Ainsi, est mis en œuvre le déni de la dimension politico-historique de la Shoah et sa transformation en réalité religieuse, ce qui conforte tout à fait le monde arabo-islamique pour dissocier la Shoah de sa signification politique centrale. Cependant, tout comme la mention de l’Holocauste, l’inclusion de l’antisémitisme a soulevé des réserves de la part de la République islamique d’Iran, qui a indiqué que ce terme devait « s’appliquer aux Arabes et aux Juifs », l’OCI soulignant pour sa part (sans même mentionner les Juifs) que « les Arabes constituent la majorité écrasante des Sémites ». Comme avec l’Holocauste, la « reconnaissance » des Juifs aboutit aux Palestiniens et à l’islam (9). En effet, les Juifs pourraient bien être traités d’« antisémites » s’ils étaient « islamophobes »... C’est bien ce tour de passe passe qui est sans cesse rejoué à la commission des droits de l’homme de l’ONU.
LA FAUTE MORALE
Une conscience juive a du mal à accuser le coup de l’indignité morale dont a fait preuve la FMS. En effet, le troc symbolique concernant Israël s’est doublé d’un autre troc concernant la mémoire des sépharades, bradée à bas prix pour obtenir une reconnaissance de la mémoire de la Shoa. La FMS s’est sentie en effet obligée de réécrire leur histoire pour fonder son entreprise. La lecture du site d’Aladin fournit un exemple rare d’historiographie où l’amateurisme le dispute à la complaisance.
On peut déjà se demander ce qui autorise la FMS à parler au nom du monde sépharade, à la mémoire duquel elle ne s’est jamais intéressée et pour la représentation duquel elle n’a aucun mandat légal, ni aucune légitimité. Ce que l’on pressent de mépris ethnique derrière cette façade de « bonne volonté » est accablant. « L’Appel à la conscience » déclare : « C’est une grave offense que de réécrire l’histoire pour des motifs politiques » ». On ne peut pas mieux dire ! Mais charité bien ordonnée commence par soi-même.

Cette institution est sortie du champ de ses attributions en instrumentalisant l’histoire des communautés juives originaires du monde arabo-musulman. Le récit historique des rapports judéo-arabes qu’elle propose, sur le site d’Aladin, fait bon marché de leur mémoire en évacuant l’essentiel du contentieux politique, historique et moral qui obère le rapport des Juifs et des musulmans aujourd’hui et qui est avant tout leur contentieux, à eux qui sont originaires de ces pays-là.
Le livre collectif, La fin du judaïsme en terres d’islam (Denoël), que je viens de publier sous ma direction tombe à point nommé. Il fait le clair sur cette histoire contemporaine », à laquelle j’avais déjà consacré 2 numéros de la revue Pardès (10). Il existe très peu d’ouvrages sur ce sujet car l’historiographie de ce drame concernant un million de personnes est un tabou, y compris en Israël. Un jour l’histoire de cette occultation sera aussi écrite. La FMS ne peut invoquer l’innocence et l’ignorance, en la matière. C’est un choix politique et moral qu’elle a fait en toute connaissance de cause de minoriser (par mépris ?) les témoignages et les faits de cette histoire pour « arrondir les angles ».
Bien avant la question du sionisme et de l’État d’Israël, c’est le statut des Juifs en islam qui est en effet en question dans le monde arabo-musulman. A-t-on remarqué qu’il n’y avait quasiment plus de communautés juives dans ces pays depuis les années 1970 ? Les faits historiques d’avant l’ère coloniale témoignent de ce que le statut des non musulmans, les dhimmis, n’engendrait pas seulement la condition de nation dominée, ségréguée, mais aussi et surtout un régime de vexations et d’avilissement, de tracasseries permanentes. L’OCI n’y a pas renoncé car dans la « Déclaration des droits de l’homme en islam », qu’elle a édictée (1990), il est statué que ces droits ne sont valides que s’ils sont en conformité avec la Sharia. Qui ne reconnait pas l’égalité, des Juifs, des chrétiens et des femmes.
Le scandale que représente la création d’Israël pour ce monde-là, c’est avant tout l’auto-détermination d’une nation (dhimmie) dominée. L’histoire tragique des Arméniens en quête d’indépendance en fut le premier acte. La disparition progressive des Arabes chrétiens dans ces pays aujourd’hui en est l’acte final. Au sortir de la période coloniale, qui fut pour ces nations dominées, on le comprend, une libération, les Juifs étaient en passe de redevenir des dhimmis. Le nationalisme y avait engendré un antisémitisme qui n’avait rien à envier à ses homologues européens et qui puisait dans un fonds islamique dont des livres entiers peuvent témoigner. De puissantes vagues antisémites ont conduit soit à leur expulsion, encadrée par un véritable « statut des Juifs » (Égypte, Lybie, Irak, Syrie), soit à leur exclusion de tous les domaines de la société, en fonction de processus sournois, et la plupart du temps d’une violence pogromique servant d’avertissement. Il n’y avait pas de place pour les Juifs dans les nouveaux États nations qui, très vite, adoptèrent le Coran comme loi constitutionnelle.
Tel est le B.A-BA du contentieux judéo-musulman, du Maroc à l’Iran. Il ne commence pas avec le sionisme et à cause de l’État d’Israël mais bien avant la période coloniale. Tous les documents historiques sont là pour en témoigner. La FMS a prétendu le clore pour solde de tous comptes.

LE NÉGATIONNISME DE L’HISTOIRE DU MONDE SÉPHARADE PAR LES TEXTES

Le modèle rhétorique de la FMS est facile à reconstituer à partir du discours qui nourrit le site Aladin. Il est intéressant d’y glaner des citations pour comprendre la stratégie idéologique qui est à l’œuvre. C’est le banc d’essai d’une réécriture négationniste de l’histoire.
La complaisance est son principe général. Il s’agit de flatter la partie islamique, ce qui se fait toujours, très systématiquement, aux dépens du christianisme et de l’Europe, présentés sous la forme d’une comparaison négative, de façon à faire croire à une plus grande complicité, une plus grande proximité des Juifs et des Arabo-musulmans. Cette complaisance ne fait que conforter un univers ethnocentrique qui méconnait avec suffisance le destin de ceux qui y étaient différents et elle favorise l’anti-occidentalisme.
Quand une mention est défavorable aux Arabes et à l’islam elle se voit toujours immédiatement équilibrée par une affirmation positive, de façon à annuler l’effet négatif, comme pour excuser et amoindrir la responsabilité. La comparaison avec la culpabilité de l’Europe joue à ce moment-là comme l’argument massue.
Aladin reproduit le modèle de l’idéologie dominante contemporaine qui récuse l’idée que deux « camps » s’opposeraient sur la scène internationale. Le concept de « camp » est inhérent à l’idéologie du « dialogue ». Il a pour origine le concept d’origine soviétique de « camp de la paix ». Il y a en effet toujours des « camps » mais la frontière passe dans chaque camp. En fait, elle passe surtout à travers le camp occidental (et bien sûr, juif) car le camp de l’OCI reste très compact, lui. La volonté de paix et de dialogue se traduit ainsi immédiatement par une guerre de l’Occident contre son propre « camp »: « Tout en ne cherchant pas à examiner les causes et les effets du conflit politique au Moyen-Orient ni ce qui est juste ou ne l'est pas, on voit que la nature de plus en plus religieuse d'une lutte territoriale a été le fait de différentes mouvances. Elles présentent ce conflit comme un clash de civilisations entre le monde musulman et la société occidentale. Des extrémistes présentent l'adversaire comme étant dénué de tout caractère moral et sans légitimité religieuse, les juifs et Israël étant présentés comme une « tête de pont » hostile établie dans le monde arabe en particulier et le monde musulman en général. La vérité, cependant, est que ce à quoi nous assistons n'est pas un clash de civilisations mais plutôt un clash à l'intérieur de civilisations. C'est un conflit entre divers éléments au sein d'une même culture religieuse. Entre ceux qui ont le sentiment d'avoir subi insultes et humiliations sur le plan historique, ce qui a provoqué leur aliénation, et d'autres éléments au sein de leur propre société ainsi qu'avec ceux qui sont extérieurs à leur culture religieuse. Le conflit interne est avec ceux qui cherchent à avoir des contacts constructifs avec d'autres sociétés dans le cadre d'une culture mondiale et d'une interaction positive avec la modernité. Ce clash « à l'intérieur même de civilisations, » signifie que des voix éclairées des deux côtés ont pour responsabilité de travailler ensemble non seulement pour devenir plus grandes que la somme de leurs différentes parties mais aussi pour apporter ce témoignage alternatif essentiel, à savoir celui de la coopération inter-religieuse et interculturelle ainsi que celui du respect mutuel. Plus particulièrement, les dirigeants musulmans et juifs doivent à leurs communautés et aux traditions de leur foi de réfuter toute exploitation destructrice de leur civilisation religieuse respective en tirant leur inspiration des exemples de la coopération et de la collaboration glorieuses du passé des enfants d'Abraham, musulmans, chrétiens et juifs, au profit de tous. »
La description de la dhimma, condition d’avilissement et de déchéance des Juifs est donc naturellement l’objet d’un déni. Le discours qui en rend compte témoigne d’une insensibilité de plomb à ce que fut la condition des Juifs en islam. Ainsi, Juifs et chrétiens « ont toujours joui d'une plus grande protection (équilibre comparatifque celle dont bénéficiaient les païens. Pendant des siècles, le statut de la dhimma a été appliqué à (sic) juifs et chrétiens dans le monde musulman. Ce qui signifie qu'en contrepartie d'un paiement d'impôts supplémentaires des droits limités leur étaient accordés. » On fait équilibre à la dhimma en la comparant au statut des « païens ». Appliqué ? Imposé par la coercition !
Quand des exactions ont été commises, le « mais » arrive toujours très vite « Mais, en dépit de leur statut de dhimmi, les juifs étaient libres de pratiquer leur religion et ils vivaient mieux sous administration musulmaneque sous administration des chrétiens byzantins. » Ce qui est une contre-vérité car le statut du dhimmi est un statut politique qui enferme les populations non musulmanes dans la religion, c’est à dire l’islam.
« En règle générale, les communautés juives qui étaient restées dans le monde musulman étaient protégées selon les termes du Pacte d'Umar. Et, si elles acceptaient leur statut de citoyens de seconde classe, elles vivaient paisiblement et en bonne intelligence avec leurs voisins musulmans. » On croit rêver et on se demande qu’elle est la conscience juive et le sentiment de dignité des gens qui font la FMS...
Le « miracle d’Al Andalous » est présenté comme si il avait été un phénomène suis generis et non le résultat d’une invasion et d’une conquête cruelle de djihad. Andalous était une terre où Juifs et chrétiens étaient des dhimmis, où il y eut des vagues d’antisémitisme théologique, de grands pogroms, etc.
La fin d’Andalous est présentée comme une menace venant d’un islam extérieur, de surcroît, justifiée par une menace chrétienne ! « Il y eut un revers de cette société relativement ouverte d'al-Andalus, puis sa fin, lorsque des armées sont venues d'Afrique du Nord pour aider à la défendre contre les chrétiens espagnols qui repoussaient les musulmans dans le nord, les chassant de leurs bastions. Les juifs subirent des restrictions sévères sous les régimes berbères islamistes et finirent par se déplacer vers le nord pour aller dans des régions conquises (sic) par les chrétiens et où, pour l'heure, ils étaient mieux traités. » C’est ahurissant, ces armées venues d’Afrique du Nord étaient les mêmes que celles qui avaient envahi l’Espagne. Par contre la Reconquista est présentée comme une conquête qui menace l’Andalousie...
Un peu plus tard, « la société islamique commença à faire place à une mentalité plus féodale, à la fois rigide et autoritaire. De nombreuses communautés juives durent (sic) s'installer dans des ghettos (qu’en de beaux mots ces choses-là sont dites !) et ici ou là (sic) des communautés juives et chrétiennes furent détruites. « Ici ou là » ? Toutes les communautés d’Afrique du Nord furent exterminées ! Faut-il parler de négationnisme ?
Les perles sur la dhimma s’enfilent, je les cite non exhaustivement :

-« le grand (sic, sic, sic) conquérant Omar Ibn Al-Khattab, calife qui spécifia les conditions d'octroi de ce statut aux protégés dans ce qu'on appelle le « pacte d'Omar ». Grâce au pacte, les « Gens du Livre » étaient autorisés à s'installer et à posséder des biens, à exercer librement leur culte, à entreprendre et à circuler. La soumission des « dhimmi » se traduisait surtout par le paiement d'une taxe de capitation (djizya) et des conditions de vie inférieures ». Merci pour l’autorisation ! Ils étaient là avant l’invasion arabe qui les déposséda de leurs biens et de leurs propriétés.
-« La situation sociale des Juifs découlait de leur statut juridique, de leur activité économique et de la tradition religieuse de leurs voisins. La masse des musulmans manifestait mépris à l'égard des dhimmi et des étrangers quels qu'ils soient, mais cette situation n'empêchait pas l'existence de bonnes relations de travail et parfois même de liens d'amitié. » « Découlait » ? Où est la responsabilité politique ?
-« Les Juifs n'ayant pas d'existence politique indépendante et ne constituant pas une nation contrôlant un territoire défini, bénéficiaient d'une présomption de loyauté envers les autorités, qui les traitaient bien, collectivement et individuellement. » Haïs par les masses, ils étaient les serviteurs obligés des potentats qui, parfois les livraient à la foule. Le chef de la nation juive était très souvent exécuté.

-« L'adoption de l'arabe par les Juifs introduisit non seulement un nouveau vocabulaire ; mais aussi un mode de pensée entièrement neuf, permettant aux Juifs des pays musulmans de participer à la culture dominante et de l'intégrer comme ils n'avaient jamais pu le faire dans l'Europe chrétienne ».
Ce qui est un mensonge si on oppose à cela l’exemple de la Pologne où les Juifs connurent une grande époque et une sorte d’État sur un grand territoire, le « Conseil des Quatre Pays ».
- « Au milieu du VIIe siècle, l'État perse devint une province de l'empire arabo-musulman. La conquête arabe substitua une religion d'État à une autre, mais pour les Juifs, c'était un progrès. Ils bénéficiaient, comme ailleurs sous la loi de l'islam, d'un statut inférieur mais protégé. Protégé contre qui ?
-« Cependant, la constitution de 1979 reconnut les Juifs comme une minorité religieuse et leur accorda un siège réservé au Parlement ». Or, c’est exactement l’application de la condition de dhimmi.
-« Les autorités ottomanes n'avaient pas posé de restrictions sur les activités professionnelles des minorités religieuses, la seule limite était l'enrôlement dans l'armée ou l'entrée dans les rouages du pouvoir et de l'administration. Les dhimmi jouissaient donc d'une totale liberté dans ce cadre ». Liberté ?
- « L'Islam maintint le statut juridique et communautaire des Juifs ainsi que leurs conditions de sécurité et, malgré les affrontements entre des tribus juives et l'armée du prophète Mahomet, le Coran reconnut le judaïsme. » La réécriture tire de la farce ici. Il y a eu une vie juive florissante en Arabie avant l’islam. Les tribus juives furent, à ce que rapporte le Coran, exterminées, converties ou chassées. On décréta qu’il ne pouvait y avoir 2 religions dans la péninsule arabique. Remarquons au passage l’équilibre établi avec la violence des tribus juives ! Ah, ces sépharades !
-« Les Juifs soutinrent la conquête de l'Irak par les musulmans. Sous la domination des califes de Bagdad, ils payaient une taxe individuelle, qui leur assurait la liberté religieuse et communautaire. » Encore une version scandaleuse de la dhimma !
-« Sous le gouvernement des Jeunes-Turcs (1908), qui menèrent une politique d'unification, ils servirent dans l'armée, obligatoire pour tous. Ils combattaient dans les unités turques pendant la Première Guerre Mondiale ou y furent médecins ou traducteurs. »Occultation totale de la persécution dont les Juifs furent victimes dans cette armée (cf l’article sur la Turquie dans le livre La fin du judaïsme en Terres d’islam) !
-« Quand Saddam Hussein accéda au pouvoir en 1979, il restait moins de 400 Juifs en Irak. La communauté juive vécut donc sous surveillance constante. Toutefois, il semble que l'attitude de Saddam Hussein envers les Juifs irakiens ait été moins excessive qu'on pourrait le croire ». En somme vive la tyrannie de Saddam !
-« Pendant la période ottomane, les Juifs d'Algérie étaient strictement soumis au statut de «dhimmi». Il faut toutefois noter une grande diversité d'application de ces règles dans l'espace et dans le temps. Des relations de bon voisinage voire d'amitié purent se nouer, notamment à l'occasion de la célébration des fêtes juives. » On est confondu par tant de mièvrerie. L’auteur semble méconnaître que les Juifs qui échappaient à la condition de dhimmi devaient acheter la protection de consulats européens qui leur conférait leur citoyenneté sur le plan juridique, en vertu d’un accord des puissances européennes avec la Sublime Porte.
-« Comme les autres Juifs des pays islamiques, ceux d'Ifriqiya (nom pris par l'actuelle Tunisie) acquièrent le statut de dhimmi. En réponse à cette nouvelle situation, les Juifs choisirent de s'insérer économiquement, culturellement et linguistiquement dans la société tout en conservant des particularités, notamment culturelles et religieuses. » Acquérir ? c’est un statut imposé, non pas d’insertion mais de ségrégation !
-« Certains Juifs marocains se réjouirent de cette mainmise coloniale, espérant que la fin du statut de dhimmi signifierait pour eux l'obtention de celui de citoyens français, comme pour les Juifs algériens en 1870. Mais ils furent déçus... Entre la création de l'État d'Israël en 1948 et l'indépendance du Maroc en 1956, 90% des Marocains juifs émigrèrent. Les plus pauvres partirent en Israël, où ils constituèrent une part importante du prolétariat et de la population des "villes de développement", tandis que l'élite et la classe moyenne émigrèrent au Canada et en France. Les Marocains juifs étaient des citoyens à part entière, électeurs et éligibles. L'État marocain leur avait établi un espace juridique conforme aux préceptes du judaïsme. Sur le plan du statut personnel, ils furent régis par la loi mosaïque, ce qui signifiait qu'ils étaient justiciables des chambres rabbiniques près des tribunaux réguliers pour tout ce qui touchait au mariage, à l'héritage et au droit des mineurs. » Ici ce sont les stéréotypes les plus éculés qui sont repris. Quant à la citoyenneté à part entière, c’est une vision négligente car les Juifs sont toujours des dhimmis au Maroc, hors du droit commun dans un pays qui ne sait pas ce qu’est la citoyenneté démocratique parce que l’islam y est religion d’État.
- « En 1882, un groupe de 150 Juifs partirent du Yémen et entreprirent un voyage harassant de 9 mois, qui les mènera à Jérusalem. En 1922, Le gouvernement yéménite réintroduisit une ancienne loi islamique laquelle contraignit les orphelins juifs de moins de 12 ans à être convertis à l'Islam. » Et ainsi l’on passe très vite sur l’extraordinaire souffrance des Juifs yéménites...
-« En 1947, le vote de l'ONU sur le partage de la Palestine eut des conséquences dans tout le monde arabe. Au Yémen, des émeutiers musulmans s'en prirent aux Juifs, en tuant 82 à Aden, détruisant des centaines de maisons juives. En 1949, quelques semaines après la fin de la guerre et à l'issue de la création de l'Etat d'Israël, la totalité de la communauté du Yémen, soit 49000 Juifs, arriva en Israël. » Les conséquences de quoi ? Du vote ou du refus du monde arabe ?
-« L'orthodoxie rigide de Saladin (1169-1193) ne sembla pas avoir affecté les Juifs de son royaume. En 1166, Maïmonide se rendit en Égypte et s'installa à Fostat ». Se rendit ? Il dût fuir les persécutions qui gagnaient la merveilleuse Andalous !
-« Sous la dynastie mamelouke des Baharites (1250-1390), les Juifs menèrent une existence relativement paisible, bien qu'ils soient obligés de payer de lourdes taxes pour l'entretien des équipements militaires, et qu'ils soient harcelés par les cadis et les oulémas de ces musulmans rigoureux ». A nouveau le même négationnisme sur la condition de la dhimma.
 La venue au pouvoir d'Hitler en 1933, bouleversa cet équilibre entre Juifs et Égyptiens, Hitler et la propagande antijuive nazie gagnèrent du terrain parmi la communauté allemande en Égypte, ce qui suscita la formation d'associations juives luttant contre l'antisémitisme ». C’est une farce ? L’auteur fait abstraction de tout le processus de dénationalisation des Juifs égyptiens par le biais d’un véritable Statut des Juifs.
-« Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, la communauté manifestait peu ou pas d'intérêt pour le sionisme. Significative à cet égard fut sa réponse aux violentes manifestations antijuives du 2 novembre 1945 (anniversaire de la déclaration Balfour en faveur de la création d'un foyer national juif en Palestine). Aux émeutes accompagnées de l'incendie de synagogues et du pillage de magasins juifs au Caire, le grand rabbin de l'époque réagit, dans une lettre au Premier ministre d'Égypte, en se dissociant de la revendication d'un État juif en Palestine. ». En somme les réactions sous la menace pour sauver sa peau sont tenues pour des positions de principe !
-« Al-Husseini et les troupes musulmanes qui combattirent aux côtés de la Wehrmacht n'étaient pas représentatives de ce que ressentait l'ensemble des musulmans lors de la deuxième guerre mondiale. En effet, des centaines de soldats musulmans venus d'Afrique, des Indes et d'Union Soviétique contribuèrent à vaincre le fascisme en se battant à El Alamein, Monte Cassino, sur les plages de Provence ou à Stalingrad. Il y eut également des cas de musulmans qui firent preuve d'un grand courage et se sacrifièrent en risquant leur propre vie pour sauver des juifs des mains des nazis. » C’est des mouvements nationalistes qu’il est question qui, tous fleuretèrent avec le nazisme. Al Husseini compte parmi les plus grands leaders du nationalisme arabe, le fondateur du nationalisme palestinien, celui qui conféra un statut religieux à l’antisionisme. L’opinion arabo-musulmane dans sa grande majorité soutenait les puissances de l’axe, ennemies des pouvoirs coloniaux.
-« Les conditions de vie des juifs dans plusieurs pays musulmans commencèrent à se détériorer au XIXème siècle avec le déclin du pouvoir ottoman et la montée de la ferveur nationaliste et du radicalisme religieux en réaction à l'influence grandissante des pouvoirs coloniaux européens. C'est à cette époque qu'apparurent les premiers stéréotypes antisémites dans le monde musulman. » La haine des Juifs vient toujours de l’Occident de surcroît colonial qui vient sans doute briser l’idylle judéo-arabe...
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On se demande en vertu de quelle autorité, la FMS réécrit l’histoire. La reconnaissance de la Shoah qu’elle escompte manquera inéluctablement son objet mais autorisera le ressentiment politique envers Israël, dont l’histoire des Juifs en monde musulman est la clef et non la mémoire de la Shoah. Elle approfondira son mépris paternaliste pour le monde sépharade. La FMS dépolitise le contentieux judéo-musulman au profit d’une sanctuarisation de la Shoah dont la moindre des conséquences n’est pas d’assigner l’existence juive à un passé muséographique. Par contre, cette dépolitisation a des conséquences éminemment politiques. Le problème avec le monde arabo-musulman, n’est pas la Shoah mais le peuple juif vivant, sujet de l’histoire.
Notes
1 - Cf. le dossier capital publié par la revue Controverses, téléchargeable à l’adresse : http://www.controverses.fr/Sommaires/sommaire9.htm
2 - Cf. idem, l’article de Ruth Attias Toledano et mon texte sur le mythe de l’Age d’or à ce sujet.
3 - Biblio-Essais, Le Livre de Poche-Hachette, 2005
4 - C’est une autre paire de manches car l’opinion arabo-musulmane joue en Europe sur un terrain déjà favorable où la Shoah est restée de l’ordre de l’impensé et de l’impensable du fait de structures mentales et morphologiques liées à la modernité politique, qui rendent aveugle à sa réalité et favorisent au contraire sa sacralisation. Cf mon livre L’idéal démocratique à l’épreuve de la Shoah, (Odile Jacob, 1999).
5 - Cf. Shmuel Trigano, « Le refus palestinien d’un Etat juif », Controverses n° 7, 2008 : http://www.controverses.fr/pdf/n7/trigano7.pdf
6 - Ce que confirme la déclaration aberrante et hors de propos (s’agissant de la Shoah) du directeur général de l’UNESCO, Koïchiro Matsuura, intervenant en premier, qui a émis le vœu que l’interculturalité et la diversité permettront une mémoire vivante de l’Holocauste dans un rapport apaisé entre civilisations en promouvant un message universel de tolérance pour les générations futures.
7 - Cf. son blog de février 2009 : http://storage.canalblog.com/89/82/412709/37001881.doc
et son livre Les nations désunies : comment l’ONU enterre les droits de l’homme, Éditions Jacob-Duvernet.
8 - Qui depuis 2005 fait l’objet d’une commémoration annuelle à l’Assemblée Générale de l’ONU.
9 - Le président du Sénégal et président de l’Organisation de la Conférence Islamique, Abdoulaye Wade, lors de l’inauguration, a considéré que la Shoah est un affront à l’humanité et attaqué avec virulence le révisionnisme établissant au passage un parallèle avec celui qui concerne l’esclavage et la colonisation. De la Palestine ?
10 - En co-direction avec Hélène Trigano, « La mémoire sépharade », Pardès, In Press, 2000 et sous ma direction,
« L’exclusion des Juifs des pays arabes », Pardès, In Press, 2003.

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