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Qui a fait le tour de quoi ? L'affaire Magellan ... Recension par Winston Belmonte

 




 

QUI A FAIT LE TOUR DE QUOI ?

L’affaire Magellan

Romain Bertand



Romain Bertrand est un jeune historien français spécialiste de l’Indonésie et partisan enthousiaste d’une nouvelle école historiographique qui se décrit comme « connectée ». Celle-ci impose de ne pas se limiter aux sources occidentales et d’interroger celles des autres civilisations qui sont directement concernées par le sujet traité. C’est assurément un noble objectif auquel on ne peut que souscrire. L’opus se veut une relation, plus équitable que les récits traditionnels, de la première circumnavigation attestée de l’histoire : l’expédition de Fernand de Magellan (Fernão de Magalhães v.1480 – 1521) entreprise pour la couronne d’Espagne en 1519-1522.

Il faut remercier l’historien pour la qualité de son style souvent littéraire, la richesse du vocabulaire. C’est l’œuvre d’un érudit. Le texte est complété par un ensemble très explicite de cartes et de sources tant ibériques (castillanes et portugaises) qu’orientales.

Magellan est mort en brave, à la tête de ses soldats, le 27 avril 1521 à Mactan lors d’un engagement ridicule qu’il eut pu parfaitement éviter. Les héros sont trop téméraires. Ils méprisent le danger. C’est précisément pourquoi le commun des mortels les admire tant. Le navigateur portugais, en dépit de son caractère très difficile et son manque avéré de diplomatie, appartient à l’élite du genre humain. La préparation, l’accomplissement et le succès du périple maritime autour du globe qu’il organisa et dirigea prouve la dimension exceptionnelle de l’individu. Cependant, il ne fut pas le premier à faire le tour de la terre puisqu’il décéda au milieu du voyage. L’exploit, en définitive, revient à Henrique, l’esclave indonésien du grand capitaine auquel il servit de truchement. L’interprète recouvrit sa liberté à la mort de Magellan selon la volonté consignée par ce dernier dans son testament. Il put ainsi retourner chez lui dans l’une des îles de l’immense archipel indonésien d’où la captivité l’avait ravi. C’est un clin d’œil de l’histoire qu’un Asiatique redevenant libre fut le premier homme à faire le tour de la terre grâce au génial projet d’un navigateur occidental !

L’auteur nous plonge au milieu d’une Insulinde contemporaine des grandes expéditions maritimes ibériques du début du XVIe siècle et le lecteur découvre un monde oriental essentiellement musulman mais flirtant avec l’immense civilisation confucéenne. Nous voici confrontés aux intérêts commerciaux et diplomatiques divergents de multiples petits ou grand États que les couronnes de Madrid et Lisbonne viennent bousculer, tout ceci naturellement au nom de la vraie foi ! L’hypocrisie est patente mais très équitablement partagée entre tous les protagonistes de la grande tragédie que constitue l’Histoire. Et c’est bien là que le bât blesse !

À lire Romain Bertrand, on comprend vite qu’il n’aime pas ces intrus européens. On peut même parler de détestation. Celle-ci, hélas, lui retire tout esprit critique vis-à-vis de la grande épopée du Portugais auquel il ne trouve que des défauts tandis que tout le reste de l’humanité – pourvue qu’elle ne soit pas blanche – se trouve parée de toutes les vertus. Curieux récit finalement que celui qui oppose les vilains Espagnols et Portugais, aux bons Patagons, ingénieux Indonésiens et civilisés Chinois !

Quel dommage qu’un esprit si cultivé cède ainsi à la tentation du « wokisme ».

Ainsi, dès le début de son travail (p. 13) l’auteur définit les Lusiades (Os Lusíadas) de Luís de Camões (1524 ou 1525 – vers 1580) comme un « monument de patriotisme pleurnichard » ! Rappelons qu’il s’agit tout de même d’un des plus magnifiques monuments littéraires de l’Humanité Pareille affirmation est d’un ridicule achevé et inutilement méchante. Il fallait oser écrire une telle ineptie. L’auteur a osé. C’est dire à quel degré de petitesse morale Monsieur Bertrand s’est abaissé. Honte à lui !

Winston Belmonte

 

 

Verdier, (11220 Lagrasse, France), dépôt légal : mars 2020, 14,50 

143 p. Texte (5 chapitres appelés « épisodes » = 87 p.) + Références et documentation + Carte générale et cartes par épisodes + Remerciements + Table des matières.

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